Pourquoi suis-je féministe ou comment Justin Trudeau m’a influencé avec son « parce qu’on est en 2016 » !


« Féministe. Longtemps j’ai eu peur de la portée de ce mot... Comme si je ne m’identifiais pas à lui dans son entièreté. Exactement comme s’il avait été tant galvaudé que je n’arrivais plus à m'y retrouver, à m’y faire une place, à me l’approprier. Comme si pour être féministe, je devais automatiquement être une activiste. Aujourd’hui, je pourrais le crier sur tous les toits, je suis féministe! L’égalité hommes-femmes comme dirait notre mère spirituelle à tous, Janette Bertrand, personne ne peut être contre ». 

Ce mot, je l’ai épinglé sur le babillard, que dis-je, sur une tribune, à la sortie de l’exposition que mon professeur d’université de mon cours Écrire au Québec nous a demandé de visiter. Je dois bien l’avouer, cette exposition sur les éditions du Remue-Ménage, cette maison d’édition qui célèbre quarante ans d’appui au mouvement féministe, j’y suis allée à reculons, en me disant presque, que vais-je apprendre que je ne sais pas déjà? Toutefois, la seule idée que ce soit un homme, mon prof, qui la rende obligatoire au programme me réconciliait avec le fait de devoir y aller.

En sortant de l'Écomusée du fier monde, les pièces du puzzle se sont mises en place dans ma tête. Ce que je cogitais depuis longtemps s’est éclairci. Bien sûr, je ne m’identifiais pas à toutes ces féministes enragées qui ont brûlé leurs brassières sur la place publique. Des hystériques, me surprenais-je à penser souvent. Pourtant, c’est grâce à elles si j’exerce l’emploi que je veux, si j’ai de bonnes conditions, si j’ai accès aux garderies, etc. Ma grand-mère qui travaillait dans le milieu de l’édition m’a révélé un jour qu’elle travaillait debout sans jamais pouvoir s’assoir, comme un cheval, s’était-elle révoltée, alors que les hommes, eux, avaient tout le loisir de s’avachir sur une chaise! Snober ses féministes reviendrait donc à leur cracher en plein visage parce qu’elles m’ont permis de me tailler une vie à ma mesure ou plutôt, à la mesure de ce qu’auraient été leurs aspirations. C’est l’équivalent de renier ce que toutes ces bâtisseuses ont construit et fait de sacrifices pour les prochaines générations, dont moi. Je leur dois tout et pourtant, je n’étais pas prête à m’afficher comme féministe, sous prétexte qu’elles ne me ressemblent pas? Bien entendu, je n’ai rien à voir avec elles puisqu’elles n’ont pas bénéficiées de la chance que j’ai eu de naître à la fin des années 70, alors que le combat marquait un tournant! Je leur suis redevable, elles m’ont forgé un avenir, une vie prometteuse. Merci. Non. MERCI!!! Ça vaut bien des majuscules et plusieurs points d’exclamation!!! C’est pourtant tout ce que je puis énoncer et ce n’est pas suffisant… Je me réconcilie avec vous mesdames. La prochaine fois, avant de ne pas m’afficher comme féministe, je n’aurai plus à tourner ma langue sept fois.

Et lorsqu’une ministre de la condition féminine affirmera au passage ne pas être féministe, je lui pardonnerai, comme vous toutes m’avez pardonné d’être inculte. Parce que nous devons faire qu’une, être solidaires. Être féministes en 2016, pour la jeune génération dont je ne suis peut-être plus, c’est ça. Reconnaître notre passé et comprendre notre histoire pour continuer de s’élever pour toutes ces femmes qui nous ont donné la possibilité de le faire, au-delà d’elles-mêmes.

J’ai épinglé mon mot sur le tableau à la sortie du musée, tout juste à côté de celui d’une femme voilée, osant nommer ce qui est arrivé à une de ses congénères, là-bas, sous un régime oppressant… Comme quoi le combat continue, même en 2016, et que nous avons toutes besoin de nous découvrir (de toutes les façons possibles) si nous souhaitons nous émanciper, une bonne fois pour toutes.       

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