L'inverse d'un parent hélicoptère, on appelle ça comment?

J’ai 44 ans et mon fils a un « 4 » de moins que moi, donc 4 ans. Je suis née en 1978 à l’époque où la Van Life n’était pas seulement une mode, mais bien un mode de vie. Si vous faites le calcul, j’ai vécu mon enfance dans les années 80 avec pour toile de fond, La guerre des tuques. Quand j’ai revu ce film il y a quelques années, j’étais presque sidérée de constater à quel point les enfants étaient laissés à eux-mêmes sans que les parents n’apparaissent presque jamais à l’écran! Puis je me suis dit : « Mautadine que c’était la belle époque! ». Car c’était vraiment comme ça, on pouvait faire des expériences sans que nos parents s’en rendent compte ou s’en formalisent! 

Dès les premiers mois de ma grossesse, moi et mon chum, qui avait 45 ans à l’époque, nous sommes mis d’accord sur une chose : Cet enfant serait élevé à l’ancienne, comme dans les années 80. On voulait qu’il joue dehors, qu’il soit libre comme l’air, comme nous on l’a été étant jeunes. Est-ce que ça vous dit quelque chose, ne pas avoir de montre (encore moins de cellulaire!), et se fier sur la vue du soleil qui baisse pour rentrer chez soi, à vélo, le soir venu?

C’est ce que j’ai vécu toute ma jeunesse à une heure de Montréal. J’ai vécu une belle enfance car j’étais toujours à l’extérieur, entourée de mes amis et de mes arbres (qui étaient mes amis aussi). À la maison, ce n’était pas toujours facile, mais ce que je me souviens le plus, c’est le bonheur d’être cachée dans une haie de cèdres pendant des heures, ou plutôt quelques minutes (soyons francs!), alors que mes amis avaient depuis longtemps abandonné l’idée de me chercher, et ce, même si on jouait à la cachette!

Mon enfant, il joue dans la « bouette ». Pas dans la boue, dans la « bouette »! Il peut jouer pendant des heures seul dans notre petite cour de Mercier-Est avec des bâtons de bois tout en observant les fourmis. Je tiens à ce qu’il porte un chapeau mais il le jette souvent par terre, protestant que ça l’empêche de bien voir les oiseaux et je vous l’avoue, souvent, j’abandonne la partie. Puis, il allume notre fusil à eau, creuse gaiement des trous dans la terre et les remplit d’eau parce que dans sa tête, il éteint un feu! Je sais, ce n’est pas très écologique, mais j’ai la paix pendant deux heures et quand il rentre les vêtements tous tâchés, on le téléporte dans le bain et on nettoie son linge avec les puissants détachants d’aujourd’hui!

J’ai remarqué la curiosité dans les yeux d’un jeune garçon qui vit en face. Il vient constamment poser des questions à mon fils pour comprendre ce qu’il fait. Son papa semble plutôt réticent à ce que j’ouvre le cadenas de la clôture afin qu’il vienne jouer avec fiston dans notre cour, je ne sais pas pourquoi! 😉

Parfois, j’ai le sentiment d’être jugée. Ça m’affecte un peu qu’on puisse penser que je suis une mauvaise mère parce que je laisse mon enfant faire des choses que les autres parents jugent inappropriés.

Je vous donne l’ultime exemple :

Nous avons une voie ferrée près de chez nous. S’il y a un ou deux trains de quatre wagons qui passent ici par semaine, c’est beau. Cette voie ferrée sera un jour (et peut-être plus tôt que prévu à cause du REM de l’Est), chose du passé.

Tous les enfants de ma génération et des générations précédentes ont déjà marché ou joué sur une voie ferrée. Quand je travaillais à MAtv Montréal, j’avais fait une entrevue avec un citoyen de Pointe-aux-Trembles de 60 ans (ce n’est quand même pas un centenaire!), qui me disait combien il avait joué avec ses amis sur la voie ferrée enfant! L’ultime plaisir était de déposer une cenne noire sur le rail pour la retrouver bien aplatie après le passage du train! On s’entend qu’à cette époque, il en passait des trains?!

L’autre jour, un citoyen du quartier où j’habite m’a sermonné parce que je laissais mon fils jouer à côté de la voie ferrée, où il y a des tas de cailloux, et que c’était dangereux. Je suis revenue chez moi un peu ébranlée. Je savais que des parents traversaient les passages à niveaux avec leurs enfants en me jugeant (le quartier est divisé en deux, on reste en haut ou en bas de la trac!), mais bon, je n’en ai jamais fait de cas.

Mais là, je me sentais plus que jamais seule de ma gang à choisir cette façon d’élever un enfant. J’avais presque le sentiment d’être une mauvaise mère. Puis, une question s’est imposée : Qu’est-ce que ça dit sur notre époque?

Comme enfant je n’ai jamais su ce qu’était le danger avant de le côtoyer de près ou de loin. Apprivoiser le danger, y faire face et savoir se comporter devant lui, développer ses réflexes, me semble que ça s’apprend et s’enseigne (bien que sur des années), non?

Personnellement, je changerais volontiers le fameux « C’est en tombant qu’on apprend à mieux se relever » pour « C’est en tombant qu’on apprend à mieux tomber! ». On veut faire du vélo avec nos enfants mais on veut à tout prix leur éviter de tomber et de se faire mal. Je m’en confesse, j’ai failli lui acheter des genouillères! Puis, le connaissant, j’ai songé qu’il ne voudrait pas les porter parce qu’il fait trop chaud l’été. J’en ai conclu que s’il tombait (ce qu’il a fait), il allait apprendre à moins tomber. C’est intéressant puisque durant cette balade, il a failli tomber à nouveau, et je l’ai observé mettre son pied par terre pour prévenir la chute. Il développe les bons réflexes. Un de mes objectifs comme mère, c’est de le rendre entièrement autonome, sans que ce soit nécessairement trop tôt dans sa vie, on s’entend! C’est important pour moi qu’en grandissant, il soit capable de développer sa réflexion quant aux impacts de ses gestes, sans que je sois toujours à ses côtés. J’ai donc commencé ça dès son plus jeune âge. Mais je sais que lorsqu’il sera plus vieux et qu’il quittera seul la maison pour la première fois afin d’aller rejoindre un ami qui reste, « de l’autre bord de la trac », je serai morte de peur!     

Moi aussi, j’ai mes réserves sur la question de la voie ferrée. Mais le bonheur de marcher sur une voie ferrée en été avec les fleurs à tes pieds, ça relève d’un pur sentiment de liberté. Ok, j’avoue, on ne l’a pas fait souvent… Mais je préfère élever mon garçon en toute liberté et lui faire apprivoiser les dangers plutôt que de les lui faire craindre. Parce que des dangers, il y en aura toujours et malheureusement, presqu’à chaque coin de rue, plus ça évolue. Comme dirait une de mes amies : « Vivre est dangereux ».

Je crois sincèrement que les enfants qui ont connu ce qu’est le sentiment de liberté étant jeunes sont ceux qui ont le plus de chances d’avoir eu une enfance heureuse, pour autant qu’ils se sentaient aimés et qu’ils ne manquaient de rien.

Et vous, qu’en pensez-vous? Suis-je une mère en perdition? Doit-on appeler la DPJ? Je souhaite aujourd’hui provoquer un débat d’idées.

Je vais dans les parcs presque tous les jours depuis 4 ans et je côtoie toutes sortes de parents. La plupart semblent faire une super job. Et puis, ce n’est pas à nous de juger un autre parent, chacun a le droit d’élever ses enfants comme il le souhaite. Mais êtes-vous d’accord qu’il y a tout un monde entre être un parent hélicoptère, et un parent qui laisse ses enfants en proie aux écrans des heures durant? Oui, là je juge, pis s’cusez là! 😉

J’ai une connaissance qui est travailleuse sociale dans une école primaire. Elle me racontait que plus les parents sont jeunes, plus ce sont d’insatiables gamers. Pas de grosse surprise jusque-là. Or, les enfants lui confient se sentir délaissés par leurs parents. Pour parer à cela, les parents les habituent à gamer plus jeunes. De cette façon, ils développent un lien parent-enfant. Mais quel genre de liens développent-ils? Est-ce qu’un lien de qualité peut surgir de milliers d’heures de gaming?

Et vous, de quel côté vous situez-vous? Penchez-vous du côté parent hélicoptère, parent old school ou encore, un parent qui parfois ou souvent, abandonne la partie? Comme dirait une autre de mes amies : « Quand on a des enfants, on gagne beaucoup en humilité! ».

Saviez-vous que selon une étude publiée récemment, 20 minutes par jour dans un parc peuvent améliorer votre santé mentale au point que vous ne tomberez pas en dépression?

Je trouve que beaucoup des enfants d’aujourd’hui sont déconnectés de la nature. Pourtant, c’est eux qui devront la sauver cette nature, cette terre, lorsqu’ils seront grands et que nous serons vieux.

Quand j’étais enceinte, mon chum et moi avons pris un engagement : Ne l’inscrire qu’à un cours de son choix à la fois. Saurons-nous respecter cet engagement? Parfois, j’observe que j’ai tendance à remplir notre agenda de la fin de semaine, afin de stimuler mon garçon, et pour me stimuler moi-même! Disons que les parcs, j’en ai soupé! J’ai mes contradictions. On en a tous. Le parent parfait n’existe pas. Alors peut-on arrêter de se mettre cette pression et juste « être parent », en acceptant les hauts et les bas qui viennent avec? I’ll drink to that!



Articles les plus consultés